Isabelle Blais et Patrick Labbé dans de beaux draps | Clin d'œil
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Isabelle Blais et Patrick Labbé dans de beaux draps

Dans le film Le prix à payer, de la cinéaste montréalaise Deborah Chow, ils incarnent un couple dont la relation s'étiole comme peau de chagrin. Bien que dans ce drame tout sépare leurs personnages, les acteurs ont de nombreux points communs: ils carburent à la passion et ils refusent les compromis et les diktats de la célébrité.

© Peter Morneau

Ensevelie sous les 30 centimètres de neige tombés la veille, la ville était un véritable chaos en ce jour glacial de février où nous avons rencontré les acteurs. Cela n'a pourtant pas empêché Patrick Labbé et Isabelle Blais d'arriver souriants à l'heure dite au studio de notre photographe, Peter Morneau, rue Saint-Hubert. Ils étaient tous deux prêts à se livrer à cet exercice parfois laborieux qu'est une séance de photos de mode. En effet, le processus exige beaucoup de patience. Il y a les essayages, la coiffure, le maquillage, l'habillage, les retouches, la mise en scène, l'ajustement de l'éclairage, la prise de vue, puis encore des retouches... Ce modus operandi, somme toute très similaire à celui du cinéma, n'a qu'un but: obtenir le cliché parfait, une sorte d'arrêt sur image où se rencontrent l'esthétisme, l'émotion et, si possible, la grâce. Contrairement à ce qu'on pourrait croire, la plupart des acteurs n'aiment pas particulièrement se livrer à ce type d'exercice.
Patrick Labbé et Isabelle Blais s'y sont néanmoins prêtés avec beaucoup d'entrain et de bonne humeur. «J'aime ça quand c'est facile, confie Isabelle, quand je me sens à l'aise avec le maquillage et dans les vêtements.
Parfois, c'est délicat... Maintenant, grâce au numérique, on peut voir les clichés instantanément. Alors, si en les regardant on ne se trouve pas jolie, ça peut devenir un exercice très pénible. Bien sûr, j'ai aussi eu des belles expériences lors de séances de photos. Il y a des fois où je me suis dit après coup que je devais en profiter, parce que je ne serai pas éternellement jeune. Ça donne l'occasion d'immortaliser des moments de son existence dans un contexte où tout est fait et pensé pour qu'on paraisse au mieux.»

Sans strass

Ils admettent tous les deux ne pas être fanatiques de mode, et encore moins fashion victims. «J'aime les beaux vêtements et j'aime m'habiller, mais je réserve ça pour les occasions spéciales. Dans la vie de tous les jours, je me maquille rarement, confie l'actrice qui a une grain de peau parfait et un magnifique teint de pêche , et je préfère les vêtements confortables.» Même chose pour son partenaire, qui est arrivé au studio vêtu d'un blouson et d'un jean, et chaussé de bottes de construction dont les lacets étaient sur le point de rendre l'âme. Normal, puisqu'elles travaillent fort! C'est que, quand il n'est pas accaparé par un rôle à la télé ou au cinéma,

Patrick Labbé se consacre à une autre de ses passions: la construction. D'ailleurs, juste avant d'arriver au studio, l'acteur était occupé à installer un plancher de bois... «J'avoue qu'après ça c'est un peu surréaliste de se retrouver sur le lit d'un photographe!» admet-il.

© Peter Morneau

Couple au bord de la crise de nerfs

Dans Le prix à payer, Isabelle Blais et Patrick Labbé incarnent Nathalie et Michel, un jeune couple qui attend son premier enfant mais dont la relation amoureuse bat sérieusement de l'aile. «Malheureusement, plusieurs couples croient à tort qu'un enfant viendra solidifier leur union, commente l'actrice. Souvent, ça vient plutôt mettre en lumière toutes les lacunes de leur relation, toutes leurs divergences...» «À un moment donné, ils se sont perdus, ajoute Patrick Labbé au sujet de leurs personnages. Ils sont tous les deux dans leur bulle: elle est enceinte, toute seule à la maison et elle est centrée uniquement sur ses propres besoins et sur le bébé. Lui se consacre à son boulot. Il est responsable d'un mandat important dans lequel il y a beaucoup d'argent en jeu, et il a une énorme pression sur les épaules.» Nathalie remet toute sa vie en question lorsqu'elle perd son enfant à la suite d'un accident provoqué par Henry, un petit trafiquant de drogue joué par l'acteur américain Zach Braff (Scrubs, Garden State). Le chauffard fuit les lieux de l'accident, mais tente ensuite de retrouver sa victime et de se racheter. La jeune femme tombe sous le charme de cet inconnu attentif et dévoué, arrivé dans sa vie comme par miracle alors qu'elle traverse l'une des pires épreuves de son existence.

Peut-on pardonner un crime pareil? L'actrice réfléchit longuement. «Dans le contexte du film, vu la manière dont la relation entre Nathalie et Henry prend forme, petit à petit, elle peut peut-être lui pardonner... Mais je ne crois pas que ce soit possible sur le coup. Ça doit prendre du temps et, dans certains cas, ça doit être impossible. Pour arriver à pardonner, j'imagine qu'il faut être passé à autre chose et avoir reconstruit sa vie. À bien y penser, c'est souhaitable, parce que vivre avec toute cette colère et ce ressentiment, ça doit être terriblement malsain.

Je dois dire que, si ça m'était arrivé et que j'avais rencontré le responsable sur le coup, je ne lui aurais pas pardonné...»

La passion avant tout

Ce drame habilement mené, qui a remporté le Prix du meilleur premier long métrage au Festival international du film de Toronto l'an dernier, a été réalisé par Deborah Chow, une cinéaste torontoise qui s'est établie à Montréal. Cette histoire de rédemption a séduit Isabelle Blais: «Des rôles comme celui-là, il ne s'en présente pas beaucoup.

Le scénario est très habile, et l'approche, extrêmement sensible. C'est pour ça que j'ai dit oui.» L'actrice est connue pour ne jamais choisir ses rôles à la légère: «Il faut absolument que j'aie un coup de coeur pour le projet, qu'en lisant le scénario je sois en mesure d'imaginer à quoi le film va ressembler. Et pour moi, c'est le rôle qui détermine tout. Chaque fois, je me demande: "Est-ce que ça représente un défi?", "Est-ce que j'ai le goût de faire ça?", "Est-ce que ça m'interpelle?" Quand c'est le cas, j'embarque... ce qui ne m'empêche pas de me poser bien des questions!» Jointe par téléphone à Los Angeles, où elle s'est rendue pour le boulot, la cinéaste ne tarit pas d'éloges sur son interprète principale, qu'elle a découverte dans Borderline: «J'ai tout de suite su qu'elle n'avait peur de rien, et que c'était elle que je cherchais... Quand elle arrive sur le plateau, elle est hyper préparée. Elle s'est interrogée sur le sens de chaque scène et de chaque réplique. Quand elle choisit de s'impliquer dans un projet, son engagement est vraiment total. Les acteurs disent parfois en entrevue qu'au cinéma, ils se donnent corps et âme, mais c'est souvent de la bullshit. Dans son cas à elle, c'est vrai.» Zach Braff, qu'on connaît surtout en tant qu'acteur comique, livre lui aussi une performance remarquable dans Le prix à payer. «Je crois qu'il s'est mis beaucoup de pression sur les épaules, avance Isabelle Blais.
Son personnage est fort complexe. Il jongle à la fois avec un profond sentiment de culpabilité, avec le mensonge, avec les faux-semblants et avec sa propre lâcheté. C'est tout à fait le genre de personnage qu'on pourrait détester. Zach a néanmoins réussi à le rendre sympathique.» Aussi sympa qu'il l'a lui-même été sur le plateau? «J'avoue que ne savais pas trop à quoi m'attendre avant de le rencontrer, confie l'actrice. Ce n'est pas une superstar, mais c'est un acteur américain qui a quand même une certaine notoriété... Cela dit, pour moi, tu as beau être la plus grande vedette du monde, ça ne m'impressionne pas. Si tu es con, tu es con! Ce qui n'est pas du tout le cas de Zach. Il a été très gentil et très respectueux. Il me faisait souvent des commentaires élogieux. Tant et si bien que parfois je lui disais à la blague: "Bon, c'est correct, là... mets-en pas trop!"»

Chimie 101

Patrick Labbé et Isabelle Blais n'avaient eux non plus jamais travaillé ensemble: «On a tous les deux fait partie de la distribution de Nos étés, mais on ne s'est pas croisés. Cent ans séparaient nos personnages! J'avais d'elle la même perception qu'en a le public, qui l'a découverte grâce à ses rôles à la télé et au cinéma, explique Patrick Labbé. C'est une fille qui n'en fait jamais trop. Elle est toujours juste. En la voyant travailler sur le plateau, j'ai pu constater que mes impressions étaient fondées. Quand elle joue, ça semble facile, ça semble couler de source. Ç'a été un plaisir de la rencontrer, mais aussi de constater toute son expérience.» Isabelle renchérit: «C'est vrai que, quand la «chimie» est bonne entre deux acteurs, c'est plus facile. Par contre, j'ai l'impression de ne pas avoir eu l'occasion d'apprendre à vraiment connaître Patrick. On avait peu de scènes ensemble et, dans celles qu'on partageait, le plus souvent on était en opposition. Parfois, sans le vouloir, on traîne un peu cette énergie-là avec soi sur le plateau, même quand on n'est pas en train de jouer une scène. Pour garder l'émotion des personnages intacte, il faut parfois s'isoler un peu. J'ai néanmoins eu l'occasion de constater pendant les pauses qu'il a un excellent sens de l'humour!» Nous aussi, tant et si bien qu'à quelques reprises les traits d'humour de l'acteur ont contraint notre photographe à rappeler ses sujets à l'ordre.
Oui, le glamour, le strass et un certain surréalisme règnent souvent en maîtres pendant les longues séances de photos de mode, mais l'humour parvient aussi parfois à s'y frayer un chemin en provoquant l'hilarité de tous...





Le prix à payer (The High Cost of Living en version anglaise) sortira en salle au Québec dès le 22 avril.




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